«Analyse de l’exploitation minière dans les aires protégées : cas de Sambia de 2014 à 2022» telle est la thématique développée par l’étudiant Pierre Mungu Guma de la faculté de Droit, Département Privé et Judiciaire au sein de l’université Bâtissons l’Espoir au Centre de l’Afrique (UBECA), située à Dungu dans la province du Haut-Uele au Nord-Est de la République Démocratique du Congo. Ce travail de Fin de cycle a été défendu mardi 13 Décembre 2022 sur place à Dungu.
Dans ce Travail de 65 pages, cet étudiant a démontré les difficultés qui sévissent dans cette aire protégée et dont la situation semble être particulière.
«L’histoire de l’orpallage à Sambia remonte aux environs de 1925 avec le passage de la société minière SOKIMO dans cette région. Cette entité est devenue une aire protégée en 1974 par l’arrêté ministériel créant le domaine de chasse de Gangala na Bodio donc c’est plus ou moins 50 ans après. Avec ce demi siècle, il ya des personnes qui sont nées, grandies et mortes en exerçant l’orpaillage. Une activité interdite dans une aire protégée. Comprenez que la situation est très particulière », a-t-il motivé dans son travail.
Pour cet étudiant, outre cette particularité plusieurs autres causes sont à la base de l’exploitation minière à Sambia, entraînant plusieurs conséquences sur l’écosystème.
« L’exploitation minière à Sambia se motive aussi par la pauvreté de la population; cette derniere se trouvant dans une situation de vie difficile, estime que seule l’orpaillage peut lui permettre de résoudre ses différents problèmes de subsistance et construire sa vie. Pour d’autres, l’or à Sambia est un don ancestral étant donné qu’ils sont nés et grandissent en pratiquant l’activité d’orpaillage. Il y a aussi le manque de l’importance de la biodiversité par cette population qui ne jouit pas des avantages liés à cette aire protégée. On y ajoute également le mauvais traitement des natifs qui sont recrutés par les gestionnaires de cette aire protégée. Ces jeunes sont des fois révoqués d’une manière irrégulière et après ils sont obligés de rejoindre l’orpallage à Sambia pour leur suivi. Comprenez donc qu’il ya plusieurs facteurs qui sont à la base de cette violation des lois. Cela entraîne malheureusement plusieurs conséquences sur l’écosystème : perturbation climatique, déboisement, pollution de l’eau, et surtout les risques de perte de la valeur de cette entité qui devrait être pourtant un motif de fierté pour la région.», a souligné le récipiendaire.
Avant d’enrichir:
«Vous allez constater, comme remarqué lors de notre recherche, pour sauvegarder leurs intérêts, les gestionnaires de cette aire protégée ne font pas le langage franc sur cette question. La population pour sa part, qui ne se trouve pas vraiment dans cette gestion, joue tout simplement à l’hypocrisie. Lors de notre recherche à Sambia nous n’avons pas réussi à identifier auprès de la population les réalisations de développement communautaires faites par les gestionnaires sinon quelques projets argo-pastoraux dont le résultat a moins d’impacts sur la communauté locale».
Ainsi, dans sa conclusion, Pierre Mungu Guma a estimé qu’il est impératif qu’une période de transition soit mise en place avec toutes les parties prenantes pour dégager les voies de sortie de crise. Il a également insisté sur la gouvernance participative.
«Le président de la République Félix-Antoine Tshisekendi Tshilombo a dit dans son adresse à la nation en 2021 qu’il est nécessaire avant d’interdire à la population de pratiquer telle ou telle autre activité (dans les aires protégées), lui montrer les alternatives durables […]. Ce qui reste encore un grand défi à relever au sein de la gouvernance congolaise. Nous avons suggéré à l’État congolais de prendre plus de responsabilités dans la gouvernance en la matière. Le législateur Congolais doit également adapter nos lois à nos réalités et non nous copier et coller les lois européennes qui ne sont pas adaptées à notre situation. Les gestionnaires doivent faire bénéficier à la population ce qui lui revient comme avantage conformément à l’article 60 de la loi 14. Il ne s’agit pas d’une faveur mais d’un droit. La population doit aussi savoir que ce n’est pas seulement l’orpaillage qui doit lui faire gagner la vie et d’ailleurs cette situation impacte négativement aussi leur santé. La population doit aussi scolariser ses enfants. C’est bien de critiquer aujourd’hui telle ou telle autre aspect de la gestion de cette aire protégée mais, c’est mieux de se poser la question de savoir qu’est-ce que nous faisons pour trouver des solutions à ce problème. Aujourd’hui, on dit que la majorité des agents décideurs ne sont pas les fils de Dungu ou de Faradje, oui c’est vrai. Mais combien de ces fils et filles de Faradje sont licenciés en Agronomie, environnement, Géologie,…? On ne va pas quand-mêmemême recruter les DE comme conservateur. La responsabilité est donc partagée, et chacun à son niveau est appelé à faire quelque chose.» a-t-il conclu.
Après exposé, débat et délibération en huis clos, le travail a été jugé «très recevable» par le jury (synonyme d’une distinction).
Jeune et journaliste leader actif dans le territoire de Dungu, Pierre Mungu Guma avec ses 6 autres camarades de la faculté de Droit, département de Droit Privé et Judiciaire et ceux de l’économie gestion, Psychologie et sciences de l’éducation et Agronomie dont la défense intervient le 19 décembre prochain, seront sauf changement de dernière minute collés en grade le 22 décembre de l’année en cours.
Pierre Mungu est également correspondant d’Orientalinfo.net, un média en ligne des informations générales de l’Est de la RDC, basé dans le Haut-Uele.
Xavier Tereka